La préparation d'un long voyage en solitaire à vélo est essentielle pour être plutôt tranquille physiquement et mentalement. Du matériel fiable Pas de surprise : il faut du très bon matériel solide. Le vélo que j'ai a tenu le choc sur les pistes d'Ouzbekistan, du Kirghistan, du Xinjiang, du Pérou, de Bolivie, du Chili, du Maroc, du Rwanda, de Tanzanie, du Kenya, d'Argentine, d'Equateur, de Colombie, de Norvège et ... des Pyrénées et des Alpes ! Quasiment pas de roue voilée malgré la très lourde charge que j'ai. Gonfler à 4 bars s'est révélé être une bonne option même si avec cette pression on saute souvent comme un cabri. La rubrique matériel de ce site en indique les principaux éléments. Après le Maroc, j'ai remplacé la cassette du pédalier. Ce matériel est plutôt un peu cher mais cela évite aussi d'en changer trop souvent. Après Goma-Nairobi, j'ai remplacé tout le roulement de la roue avant (les billes étaient très oxydées), les gaines, patins et câbles des freins, les câbles des dérailleurs, les trois plateaux. Les pneus Marathon étaient encore en état après Lima - Santiago, Maroc, Goma-Nairobi, La traversée des cols andins (Argentine-Chili), Quito-Lima, la Colombie, la Norvège et ... quelques cols pyrénéens et alpins. J'ai dû les changer tout récemment dans l'Anti-Atlas au Maroc. Pas de matériel inutile Qu'est ce que je n'ai pas utilisé ? La pompe-filtre à eau. J'ai porté jusqu'à 12 litres de liquide au cas où ... Je n'ai pas utilisé mes instruments de dépannage : clefs, dérive-chaîne, cables, rustines, colle, pince, tournevis, pneu de rechange. C'est plutôt bon signe. Je continuerai néanmoins à les avoir avec moi. Pour des nuits de récupération La tente sera la même malgré les déboires que j'ai pu avoir mais au retour de Pékin. L'arceau frontal par trois fois a explosé lors du démontage. Cela s'est traduit par la rupture violente d'un brin à chaque fois au niveau de l'emboîtement avec une fissure longitudinale de 3 cm prolongée par une fissure horizontale de 1 cm. La question posée au fabriquant Mountain Hardwear n'a pas eu de réponse. Toutefois, grâce au magasin de sport Vertige de Gap, j'ai pu avoir du fabricant un nouveau jeu d'arceaux : merci à Vertige. La tente EV2 reste très solide (tente d'assaut pour les expéditions en montagne) et très facile à monter par toutes conditions. Ce sera une sécurité pour moi sur les hauteurs de l'Atacama en cas de coup dur (froid et neige, à condition que le vent puisse permettre le montage ... ce qui ne fut pas le cas ...). Pour le couchage, sac duvet, gilet duvet, sac en soie et pyjama restent les petits éléments de confort indispensables à une bonne récupération. J'ai remplacé le matelas gonflable Thermarest par un matelas mousse alvéolé de la même marque pour être à l'abri des sempiternels dégonflages nocturnes. Du chaud Chauffer ? Le réchaud à essence est finalement peu gourmand en essence sans plomb que l'on peut trouver partout. Une réserve d'1 litre est largement suffisante pour plusieurs jours d'utilisation. Ce réchaud reste toutefois un peu délicat à allumer, le préchauffage s'accompagnant pendant quelques secondes d'un fort dégagement de fumée noire. La mise d'eau très chaude dans un petit thermos le soir évite un allumage fastidieux le matin : bonne solution expérimentée en Asie et en Amérique. Mais on peut s'en passer très souvent. Maintenant, je ne porte plus de réchaud donc ni d'essence donc ni de gamelle. J'ai opté de manger froid : gain de poids et moins de préoccupation pour la sécurité. Que porter en double ? C'est un vraie question, mais se pose alors la contrainte du poids et du volume ... Quelques éléments en plusieurs exemplaires me semblent indispensables : chambres à air, rustines, (joints réchaud), batteries, gants, câbles, patins de frein. Des réserves au cas où ... Faut-il avoir une réserve alimentaire au cas où ? Comme je l'ai fait en Asie, en Amérique du sud, en Afrique avec satisfaction, je prévois quelques sachets de purée déshydratée qui cale bien le soir, des fruits secs, et évidemment beaucoup de liquide : un fond de réserve de 4 litres d'eau, et, pour les secteurs les plus chauds, environ 12 litres de liquide. Pour le périple très spécial à plus de 4000 m (traversée andine Argentine-Chili) où les points de ravitaillement sont rares, j'ai emporté six repas lyophilisés. Mais, cette expérience ne m'a pas convaincu. Je préfère porter maintenant des boites de thon à l'eau et, éventuellement, de la purée déshydratée. Des vêtements pour l'altitude Pour les vêtements, même solution qu'en Asie et en Amérique du sud : tout en double pour assurer l'hygiène élémentaire mais des sous-vêtements performants pour le froid possible. Casque bien sûr qui tient ma tête en place ! ... Mais oui !.. Cagoule supplémentaire avec bandeau-ski pour les oreilles, et ... lors de grand froid morceau de tissu léger sur le visage pour réchauffer l'air avant d'atteindre les bronches. Je tire ainsi la leçon de ce manque au Kirghistan. Mêmes chaussures Merrell qui ont la bonne particularité de ne quasiment pas sentir, d'avoir un avant de pied large et rigide. Plein de sacoches Toujours 4 grosses sacoches plus la sacoche-guidon et la sacoche-selle. Mais deux petites sacoches ajoutées aux sacoches avant pour contenir réchaud et réserve d'essence de façon à ne pas les mélanger à la ... nourriture. Le réchaud à essence sera fixé au porte-bagage avant, avec l'enveloppe de secours. Des gros pneus Enfin, j'ai choisi de changer mes pneus pour mieux passer dans les parties sablonneuses : des pneus plus larges, des Marathon XR 26 x 2. Je pourrai ainsi gonfler avec moins de pression mais, si le confort peut ainsi être meilleur, il faut aussi un peu plus tirer sur les jambes. Etonnants ces pneus : après plus de 12 000 km (Lima-Santiago, Maroc, Goma-Nairobi, cols andins entre Argentine et Chili, Quito-Lima) ils étaient encore en état. Tout ça fait un poids certain (de l'ordre d'une cinquantaine de kg vélo compris). Mais l'expérience me montre que la vraie question est plutôt celle de la répartition avant / arrière et haute / basse du poids : en gros, 2/3 à l'arrière, 1/3 à l'avant. Dans cette préparation, beaucoup de place est faite au matériel car il faut essayer d'éviter au maximum les pannes. Un physique ... pas trop entraîné Contrairement à ce que l'on peut penser, il n'est pas nécessaire d'être au top de la forme pour faire un périple solitaire en vélo, même pour de très longues distances. Un état physique à peu près potable mais avec une habitude régulière de la pratique du vélo par tous les temps, est suffisant. L'important finalement c'est quoi ? Ne pas avoir mal aux fesses, ne pas se défoncer car il faut repartir le lendemain, s'économiser un maximum pour pouvoir ... trouver de quoi manger le soir, un endroit où dormir, et rester lucide pour les choix à faire. Pour tout ça, le physique n'est plus que secondaire. Néanmoins, il est bien certain qu'une pratique régulière du vélo avec quelques heures par semaine où l'on pique une bonne suée, est bénéfique ! Pour moi, le col de Marie-Blanque à vélo depuis Eysus tout comme la montée de Ceüze dans les Hautes-Alpes sont une pratique routinière, une question ... d'hygiène presque, tout comme le sont les sorties en montagne dans les Pyrénées ou ailleurs. Un mental bien en place C'est le troisième volet du triptyque indispensable pour se donner les meilleures chances de réussite, avec le matériel et la forme physique. Garder sa capacité d'anticiper les choses, c'est tout à la fois réfléchir à chaque instant pour optimiser l'énergie que l'on donne pour avancer, c'est encore faire les bons choix c'est-à-dire prendre les bonnes décisions, le tout pour arriver chaque soir avec le moins de fatigue et le plus sérénité. Pour cela, il ne faut pas penser au matériel, et il faut bien assurer les liaisons avec ses proches durant les mois d'éloignement. Minimiser les inconnues apporte une assez grande sérénité. Et, pour cela, l'itinéraire est capital. Construire son propre itinéraire Ce point technique m'a occupé de longues heures, mais l'expérience de l'Asie m'a conforté pour le juger au moins aussi important que la forme physique. Le cheminement en 3D avec Google Earth à l'aide des photographies aériennes et des images satellites peut permettre de fabriquer d'assez bonnes cartes d'itinéraires précis, et donc d'entrer des balises géographiques dans un GPS pour se rassurer sur le terrain lorsqu'on est en situation d'incertitude sur les directions à prendre. Je trace sur Google Earth un itinéraire. Cet itinéraire est donc une polyligne où chaque changement de direction est géographiquement précisée en longitude et en latitude. Je reporte ces points géoréférencés dans un logiciel SIG (MapInfo par exemple) avec le même système de projection que Google Earth. Ceci me permet de préciser entre les points les distances kilométriques. Ainsi, je peux construire un road book associant images en 3D (Google Earth) et distance. De plus, je peux sélectionner des points stratégiques (à des bifurcations par exemple) que j'insère dans un GPS pour, étant sur place, confirmer que je suis bien dans la bonne direction. Quito-Lima m'a permis de tester un matériel étonnant : une tablette (Asus) avec clavier et puce GPS intégrée qui me permet, même dans les endroits les plus reculés sans bien sûr de connexion réseau téléphonique ou internet, de visualiser l'endroit précis où l'on se trouve sur fond de carte Google maps et Google earth. Un matériel très solide qui a résisté aux pistes défoncées et pierreuses des quebradas péruviennes. Au total, se préparer reste une somme d'opérations très disparates mais chacune est indispensable pour se donner les moyens de la sérénité.
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